Thibault Poursin
« Il ne s’agit pas de peindre la vie. Il s’agit de rendre vivante la peinture. »
J’aime particulièrement cette phrase de Pierre Bonnard, qui résume parfaitement ma conception de l’art. Dans un monde ou tout et n’importe quoi peut être appelé « art » on se trouve perdu au milieu de quelque chose qui ressemble à une cacophonie, du chaos. Voici peut-être la lumière qui permettrait de s’orienter. Chercher la vie qui se dégage d’une œuvre. On la trouve parce que l’œuvre agit comme un miroir, et dans ce miroir, ce que l’on peut reconnaître, ce qui fera écho, c’est l’essentiel de ce qui nous anime. Dans la peinture traditionnelle chinoise, il me semble qu'on appelle ça le « souffle ».
Mais savoir reconnaître la vie dans l’art, finalement ça revient à se retourner sur soi-même, à faire ce voyage intérieur si difficile de la connaissance de soi. Il est donc naturel qu’à différentes périodes de la vie, notre regard évolue. Un animal, une plante ou même une rivière ne sont pas la même forme de vie que la nôtre et pourtant nous pouvons y reconnaître instantanément l’expression de la vie. Est-ce la même chose pour l’art ? Je pense que oui, mais l’exercice est rendu compliqué par l’intervention presque immédiate du jugement et de l’égo, et c’est là la difficultés principale, qui est commune à celle de la connaissance de soi, qui consiste à parvenir à se détacher des strates de l’égo, des préjugés insufflés par le social, les jugements de valeur, les comparaisons ou les classifications arbitraires, les préférences mimétiques dues à l’appartenance à un groupe.
Il y a également cette question, que je ne parviens pas à ignorer, qui est le rapport à l’argent. Ce qui n’est finalement qu’un simple outil, un objet (le plus souvent dématérialisé) qui n’a finalement que la valeur qu’on lui prête, est utilisé pour des choses qui me semblent appartenir plus à un monde de manipulation, de tromperie ou d’illusion qu’autre chose. Le thème de l’argent est utilisé pour justifier des loi injustes ou absurdes (les jours de carences non indemnisés par la sécurité sociale, ...), ou pour donner bonne impression (on met en place des « bonus écologiques » …). On juge par ailleurs souvent un artiste par sa réussite financière (tout en portant aux nues paradoxalement un Van Gogh avec l'histoire que l'on connait).
Il se trouve que pour vivre il faut de l’argent, que ce soit le sien ou celui de quelqu’un d’autre. Le problème est que le processus de création n’a que faire de ces histoires d’argent. Et d’un autre côté l’argent n’a que faire des processus de créations. On peut se retrouver à gagner de l’argent avec un certain art, et c’est tant mieux, mais que faire si tout à coup on fait autre chose, et que cette autre chose ne rapporte pas d’argent ? Il est plus facile de renoncer et céder à quelque chose d’artificiel, qui va peut-être prendre le contrôle, d’une certaine manière, de la marche à suivre. D'ailleurs quelle importance tant il est difficile de distinguer le bon du mauvais ? On connaît les Toulouse Lautrec, Cézanne ou Degas qui étaient à l'abri du besoin, mais on oublie un Sisley, par exemple, mort dans la misère. Le monde sait-il à quel point nombre d’artiste vivent en réalité aux crochets de leurs bienveillant(e)s compagnes ou compagnons ? La chose n’est évidemment pas dite, parce qu’elle est honteuse, mais un rapide passage dans le monde de l’art suffit à se rendre compte de l’étendu du phénomène. Regardez le film "SOUS LES BULLES - L'autre visage du monde de la BD" Je ne juge personne évidemment, je m’étends un peu pour montrer que le monde dans lequel nous vivons est d’une fantastique imperfection. Et ce n’est bien évidemment pas le pire, puisqu’on peut voir encore maintenant des humains dormir et même parfois mourir dans la rue, sans domicile, pendant que des milliers de locaux restent inhabités, en proie à la spéculation, que les grandes surfaces ont l’ordre de détruire la nourriture invendue, parce que la donner aux nécessiteux est considéré comme un délit. Je me permet de continuer un peu tout de même, parce que je trouve que cette situation illustre bien le type de monde auquel nous sommes confrontés. En résumé, c’est un monde ou la vie n’est pas au cœur des préoccupations, ou du moins elle semble un paramètre « oublié » du système. Songez simplement au nombre de fois, dans la vie de tout les jours, ou l’on peste contre des contraintes en contradiction totale avec notre mode de fonctionnement naturel. Pensez à ces spécialistes de la chronobiologie dont les conclusions sont présentées en grande pompe à la télévision pour être complètement oubliés dans l’aménagement du temps scolaire (on se retrouve même avec des ministres de l’éducation qui s’étonnent qu’il y ait des siestes en petite section de maternelle). Je ne sais comment et pourquoi les choses sont ainsi, je constate simplement.
Peut-être avez vous compris que ma démarche, bien que je ne la considère pas comme parfaite, ne prend pas en considération le paramètre « argent ». Vous en tirez les conclusions que vous voudrez. J'en reviens à mon point de départ : je cherche spécialement la vie, cette impulsion primordiale qui se manifeste en tout et sous toutes ses formes, cet élan infini sans quoi le monde ne serait rien.
J’aime particulièrement cette phrase de Pierre Bonnard, qui résume parfaitement ma conception de l’art. Dans un monde ou tout et n’importe quoi peut être appelé « art » on se trouve perdu au milieu de quelque chose qui ressemble à une cacophonie, du chaos. Voici peut-être la lumière qui permettrait de s’orienter. Chercher la vie qui se dégage d’une œuvre. On la trouve parce que l’œuvre agit comme un miroir, et dans ce miroir, ce que l’on peut reconnaître, ce qui fera écho, c’est l’essentiel de ce qui nous anime. Dans la peinture traditionnelle chinoise, il me semble qu'on appelle ça le « souffle ».
Mais savoir reconnaître la vie dans l’art, finalement ça revient à se retourner sur soi-même, à faire ce voyage intérieur si difficile de la connaissance de soi. Il est donc naturel qu’à différentes périodes de la vie, notre regard évolue. Un animal, une plante ou même une rivière ne sont pas la même forme de vie que la nôtre et pourtant nous pouvons y reconnaître instantanément l’expression de la vie. Est-ce la même chose pour l’art ? Je pense que oui, mais l’exercice est rendu compliqué par l’intervention presque immédiate du jugement et de l’égo, et c’est là la difficultés principale, qui est commune à celle de la connaissance de soi, qui consiste à parvenir à se détacher des strates de l’égo, des préjugés insufflés par le social, les jugements de valeur, les comparaisons ou les classifications arbitraires, les préférences mimétiques dues à l’appartenance à un groupe.
Il y a également cette question, que je ne parviens pas à ignorer, qui est le rapport à l’argent. Ce qui n’est finalement qu’un simple outil, un objet (le plus souvent dématérialisé) qui n’a finalement que la valeur qu’on lui prête, est utilisé pour des choses qui me semblent appartenir plus à un monde de manipulation, de tromperie ou d’illusion qu’autre chose. Le thème de l’argent est utilisé pour justifier des loi injustes ou absurdes (les jours de carences non indemnisés par la sécurité sociale, ...), ou pour donner bonne impression (on met en place des « bonus écologiques » …). On juge par ailleurs souvent un artiste par sa réussite financière (tout en portant aux nues paradoxalement un Van Gogh avec l'histoire que l'on connait).
Il se trouve que pour vivre il faut de l’argent, que ce soit le sien ou celui de quelqu’un d’autre. Le problème est que le processus de création n’a que faire de ces histoires d’argent. Et d’un autre côté l’argent n’a que faire des processus de créations. On peut se retrouver à gagner de l’argent avec un certain art, et c’est tant mieux, mais que faire si tout à coup on fait autre chose, et que cette autre chose ne rapporte pas d’argent ? Il est plus facile de renoncer et céder à quelque chose d’artificiel, qui va peut-être prendre le contrôle, d’une certaine manière, de la marche à suivre. D'ailleurs quelle importance tant il est difficile de distinguer le bon du mauvais ? On connaît les Toulouse Lautrec, Cézanne ou Degas qui étaient à l'abri du besoin, mais on oublie un Sisley, par exemple, mort dans la misère. Le monde sait-il à quel point nombre d’artiste vivent en réalité aux crochets de leurs bienveillant(e)s compagnes ou compagnons ? La chose n’est évidemment pas dite, parce qu’elle est honteuse, mais un rapide passage dans le monde de l’art suffit à se rendre compte de l’étendu du phénomène. Regardez le film "SOUS LES BULLES - L'autre visage du monde de la BD" Je ne juge personne évidemment, je m’étends un peu pour montrer que le monde dans lequel nous vivons est d’une fantastique imperfection. Et ce n’est bien évidemment pas le pire, puisqu’on peut voir encore maintenant des humains dormir et même parfois mourir dans la rue, sans domicile, pendant que des milliers de locaux restent inhabités, en proie à la spéculation, que les grandes surfaces ont l’ordre de détruire la nourriture invendue, parce que la donner aux nécessiteux est considéré comme un délit. Je me permet de continuer un peu tout de même, parce que je trouve que cette situation illustre bien le type de monde auquel nous sommes confrontés. En résumé, c’est un monde ou la vie n’est pas au cœur des préoccupations, ou du moins elle semble un paramètre « oublié » du système. Songez simplement au nombre de fois, dans la vie de tout les jours, ou l’on peste contre des contraintes en contradiction totale avec notre mode de fonctionnement naturel. Pensez à ces spécialistes de la chronobiologie dont les conclusions sont présentées en grande pompe à la télévision pour être complètement oubliés dans l’aménagement du temps scolaire (on se retrouve même avec des ministres de l’éducation qui s’étonnent qu’il y ait des siestes en petite section de maternelle). Je ne sais comment et pourquoi les choses sont ainsi, je constate simplement.
Peut-être avez vous compris que ma démarche, bien que je ne la considère pas comme parfaite, ne prend pas en considération le paramètre « argent ». Vous en tirez les conclusions que vous voudrez. J'en reviens à mon point de départ : je cherche spécialement la vie, cette impulsion primordiale qui se manifeste en tout et sous toutes ses formes, cet élan infini sans quoi le monde ne serait rien.