La création de l'égo
Il y a eu cette idée de décomposer des jouets en petits morceaux de différentes couleurs, et le jeu créatif fut guidé par des manuels très précis.
L'homme audacieux ou dépité qui lèvera brièvement les yeux au-dessus du carré fluorescent qui lui sert de pense-bête pour occuper ses normes journées s’apercevra bien vite que les objets qui l'entourent ne sont que la pâle copie des vagues reflets qu'il contemple longuement à travers son écran.
Mais s'il prolonge quel que peu son regard il trouvera quelques minuscules imperfections, par-ci par-là, agaçantes au premier abord mais finalement intrigantes.
Des petites croûtes, des lignes pas tout à fait droite, de la poussière aussi, qui s'élève toute seule, envers et contre tout.
Il verra que ses doigts, en proie à la transpiration ou douloureusement desséchés, peuvent bien se lasser de ne servir qu'à des taches répétitives et abstraites, qu'ils peuvent frôler, caresser, froisser. Les choses ne demandent que ça. Qu'on les renifle, qu'on les sente, qu'on les touche.
Mais ces choses, finalement peu variées, ne valent pas l’obscène diversité de la nature. A force d'avoir tout nettoyé, on ne peut plus se salir les mains.
Heureusement il reste ces petites imperfections, entêtantes. Des petites choses qui occupent l'esprit, un peu, avant de le laisser à nouveau vagabonder ou même se perdre dans la lumière artificielle.
Celui qui saisi son stylo d'un air décidé peut bien croire qu'il hésite ou qu'il est en proie au vertige de la création. Peut-être bien qu'en réalité il se laisser absorber par des ombres argentées. L’œil froid et norme du verre poli se place sur nos organes comme une main surpuissante, nous rappelle à l'ordre, pas celui de la nature, mais celui qu'on a fabriqué, qui nous échappe ensuite comme un pantin animé d'une volonté incompréhensible. Celui-là qui a ses propres règles, qu'on essaye de copier vainement, pourrait bien bien ricaner s'il avait un peu d'humour, mais il n'en a pas plus que de volonté, il se contente de rouler sa carcasse collante imprégnée des choses du monde, continuant sur sa lancée, tant qu'elle est encouragée par sa pente naturelle, tapissée des remous de nos fronts soucieux.
On croit savoir une chose puis on oublie bientôt ces idées qui nous frappaient hier avec une folle évidence. Puis on les recroise à nouveau et parfois on se demande comment on a pu se laisser berner avec tant d'innocence.
L'artiste n'a d'autre volonté que de suivre sa nature et ses émotions. Pour peu qu'il ne cède pas à l'attrait du gain facile. Le peuple attend de l'art qu'il suive sa nature et ses émotions. Il veut s'y voir. Il prétend que tous les goûts sont dans la nature mais tolère difficilement les goûts variés. Il lui faut bien des références pour s'orienter lorsqu'il recherche de toute force le bon goût. La diversité enrichit mais égare.
L'égo des machines projeté sur le vivant
Il fut un temps de l'homme machine, puis le temps de la machine outil se figea en un reflet du vivant.
Celui qui croit savoir frappe toujours par son manque de discernement, il exaspère, tout comme celui qui doute toujours.
Il existe de grands boulevards, destinés à un petit nombre. Qu'on y passe ou qu'on prenne les ruelles, on erre dans la ville, lorgnant les devantures pleines à craquer mais résistantes à donner. On s'échine à acquérir une technique qui semble souvent dérisoire face à la puissance de quelques machines. Quand on préférera réellement le travail vide d'un mécanisme bruyant alors peut-être il faudra déposer les armes.
Ce sont des cliquetis entêtants, qui pourraient être agaçants s’ils ne devenaient pas, de par leurs nombre considérable, d’immenses tableaux et récits fantastiques. Il n’y a qu’une succession d’entrée et de sorties, des allez-retours.
Le bonheur du discernement
Il plissa les yeux et fut surpris par l'intense agitation intérieure qui résultait de l'idée qu'il se faisait de l'impression qu'il donnait.
Chacun sait distinguer le bien du mal, les opinions tourbillonnent autour des objets, vivent et meurent comme des bugs. On rêve l’objectif, on croit en l’universel.
Sur cette place vous verrez des attroupements. Serrés devant des personnages à l'allure excentrique ou pleins de sérieux, foisonnant de détails sur le sens de ce qu'il font, accessible à tout un chacun. Il n'est pas possible de faire tout à la fois, tant les pratiques sont différentes, tout au plus peut-on naviguer de l'une à l'autre. On ne peut pas non plus remplacer le maître. Sa légitimité est une force mystérieuse miroitée par un succès au moins commercial, appuyé par cet auditorat attiré par l'odeur du succès argenté. Il y a des dieux qui tirent des ficelles, allument des mèches avec leurs briquets flamboyants et restent dans l'obscurité. Devant ce spectacle navrant, on se bat pour tenter de devenir maître, ou à défaut se contenter des miettes, sans voir le mécanisme artificiel entre les mains des dieux, qui déploient une énergie considérable à ramener sans cesse notre attention sur le spectacle. Ne regardez pas le noir, qui fait si peur, allez vers la lumière, jouissez du spectacle avec ses milles feux. Il est dangereux de se pencher au-dedans. Il y a là cette pratique, de suivre des yeux de gauche à droite un mouvent de mains, pour soulager peurs et tensions ... Il y a aussi ces histoires ou l'on voyait un illusionniste agiter un pendule devant les yeux de certaines personnes. Les similitude du temps qu’on ne sait plus présent ou passé, peut-être même futur. Pourquoi se souvenir ? Mais non, ayez peur, il est dangereux de se pencher au-dedans, qui sait ce qu'on peut y trouver ? Un monstre qui tue sur commande, un assassin ou un cannibale ... les films nous le certifient. Non il n'y a rien d'autre. Ce qui est sombre et noir n'est que violence et peur. Il ne peut rien y avoir d'autre. Restez sur la surface : un mouvement de mains vous soulage ? C'est parfait, surtout n'allez pas chercher plus loin. Et eux, avec leurs ficelles, savent-ils qu'il sont dans l'obscurité ? Peut-être qu'ils sont là parce qu'ils ont peur. Soudainement éclairés et visibles par tous, leur mécanisme grotesque ne leur appartiendrait plus. Oui parce que lorsque la lumière est là, l'ombre n'est plus, et on y trouve ces nouveaux objets.
Il existe tant de choses que nous ignorons, des sujet les plus banals et les plus simples. Il est moins grave de savoir tout. Et on prend plaisir à molester de son savoir bancal les quelques ignorants qui ont moins de bagage. Comme une sinistre loi de la jungle, celle que l'on a inventée pour symboliser notre jouissance à dominer les faibles. Est-il dangereux d'admettre notre ignorance, et la fragilité de notre supposé savoir ? Celui qui a vu une certitude s'effondrer sait la peur qui l'accompagne. Mais il sait aussi qu'elle n'est que provisoire. Elle a même le goût de la recherche de la vérité. Comment en vouloir à ceux qui sont saisis d’effroi à l'idée de perdre leurs repères ? Il ne savent pas que l'inconfort n'est que provisoire, parce que la réalité, à défaut de vérité, reste solide, on peut s'appuyer sur un sol même si on ignore de quoi il est fait. Cela nécessite néanmoins la capacité d'arriver à s'installer dans un solide inconnu, un instant présent. Dans le silence de l'être conscient et non agissant.
L’art d’être au présent
Face au temps on se sent si démuni
Le matin l'air frais emplit ma gorge, et mon nez coule à flots. Il s'irrite des frottements répétés du mouchoir. La lumière du matin, bleue et orange à la fois, le vent. Marcher, pour un but qui n’est pas le sien, avancer et feindre l’enthousiasme pour des objets qui nous sont étranger. Notre pain quotidien. On se félicite de broutilles, on se passionne de paillettes volatiles, qu’on se reproche de ne pas récolter suffisamment, qu’on veut toujours plus. La journée écrase sa fatigue sur nos épaules, et lorsque vient le soir, tout n’est que brouillard et désir d’en finir, le corps réclame son repos. Où sont les espoirs naissants au coin d’une pensée, fugitive, espoirs d’un accomplissement qui soit comme un miroir de soi et non un reflet des autres ? Le temps passe, et parfois des plaisirs futiles l’aide à se dérouler avec douceur. On arrive à oublier ce qui est soi et on se noie dans le monde. Et le temps tourne en boucle, et le corps accompli son devoir.
Il y a eu cette idée de décomposer des jouets en petits morceaux de différentes couleurs, et le jeu créatif fut guidé par des manuels très précis.
L'homme audacieux ou dépité qui lèvera brièvement les yeux au-dessus du carré fluorescent qui lui sert de pense-bête pour occuper ses normes journées s’apercevra bien vite que les objets qui l'entourent ne sont que la pâle copie des vagues reflets qu'il contemple longuement à travers son écran.
Mais s'il prolonge quel que peu son regard il trouvera quelques minuscules imperfections, par-ci par-là, agaçantes au premier abord mais finalement intrigantes.
Des petites croûtes, des lignes pas tout à fait droite, de la poussière aussi, qui s'élève toute seule, envers et contre tout.
Il verra que ses doigts, en proie à la transpiration ou douloureusement desséchés, peuvent bien se lasser de ne servir qu'à des taches répétitives et abstraites, qu'ils peuvent frôler, caresser, froisser. Les choses ne demandent que ça. Qu'on les renifle, qu'on les sente, qu'on les touche.
Mais ces choses, finalement peu variées, ne valent pas l’obscène diversité de la nature. A force d'avoir tout nettoyé, on ne peut plus se salir les mains.
Heureusement il reste ces petites imperfections, entêtantes. Des petites choses qui occupent l'esprit, un peu, avant de le laisser à nouveau vagabonder ou même se perdre dans la lumière artificielle.
Celui qui saisi son stylo d'un air décidé peut bien croire qu'il hésite ou qu'il est en proie au vertige de la création. Peut-être bien qu'en réalité il se laisser absorber par des ombres argentées. L’œil froid et norme du verre poli se place sur nos organes comme une main surpuissante, nous rappelle à l'ordre, pas celui de la nature, mais celui qu'on a fabriqué, qui nous échappe ensuite comme un pantin animé d'une volonté incompréhensible. Celui-là qui a ses propres règles, qu'on essaye de copier vainement, pourrait bien bien ricaner s'il avait un peu d'humour, mais il n'en a pas plus que de volonté, il se contente de rouler sa carcasse collante imprégnée des choses du monde, continuant sur sa lancée, tant qu'elle est encouragée par sa pente naturelle, tapissée des remous de nos fronts soucieux.
On croit savoir une chose puis on oublie bientôt ces idées qui nous frappaient hier avec une folle évidence. Puis on les recroise à nouveau et parfois on se demande comment on a pu se laisser berner avec tant d'innocence.
L'artiste n'a d'autre volonté que de suivre sa nature et ses émotions. Pour peu qu'il ne cède pas à l'attrait du gain facile. Le peuple attend de l'art qu'il suive sa nature et ses émotions. Il veut s'y voir. Il prétend que tous les goûts sont dans la nature mais tolère difficilement les goûts variés. Il lui faut bien des références pour s'orienter lorsqu'il recherche de toute force le bon goût. La diversité enrichit mais égare.
L'égo des machines projeté sur le vivant
Il fut un temps de l'homme machine, puis le temps de la machine outil se figea en un reflet du vivant.
Celui qui croit savoir frappe toujours par son manque de discernement, il exaspère, tout comme celui qui doute toujours.
Il existe de grands boulevards, destinés à un petit nombre. Qu'on y passe ou qu'on prenne les ruelles, on erre dans la ville, lorgnant les devantures pleines à craquer mais résistantes à donner. On s'échine à acquérir une technique qui semble souvent dérisoire face à la puissance de quelques machines. Quand on préférera réellement le travail vide d'un mécanisme bruyant alors peut-être il faudra déposer les armes.
Ce sont des cliquetis entêtants, qui pourraient être agaçants s’ils ne devenaient pas, de par leurs nombre considérable, d’immenses tableaux et récits fantastiques. Il n’y a qu’une succession d’entrée et de sorties, des allez-retours.
Le bonheur du discernement
Il plissa les yeux et fut surpris par l'intense agitation intérieure qui résultait de l'idée qu'il se faisait de l'impression qu'il donnait.
Chacun sait distinguer le bien du mal, les opinions tourbillonnent autour des objets, vivent et meurent comme des bugs. On rêve l’objectif, on croit en l’universel.
Sur cette place vous verrez des attroupements. Serrés devant des personnages à l'allure excentrique ou pleins de sérieux, foisonnant de détails sur le sens de ce qu'il font, accessible à tout un chacun. Il n'est pas possible de faire tout à la fois, tant les pratiques sont différentes, tout au plus peut-on naviguer de l'une à l'autre. On ne peut pas non plus remplacer le maître. Sa légitimité est une force mystérieuse miroitée par un succès au moins commercial, appuyé par cet auditorat attiré par l'odeur du succès argenté. Il y a des dieux qui tirent des ficelles, allument des mèches avec leurs briquets flamboyants et restent dans l'obscurité. Devant ce spectacle navrant, on se bat pour tenter de devenir maître, ou à défaut se contenter des miettes, sans voir le mécanisme artificiel entre les mains des dieux, qui déploient une énergie considérable à ramener sans cesse notre attention sur le spectacle. Ne regardez pas le noir, qui fait si peur, allez vers la lumière, jouissez du spectacle avec ses milles feux. Il est dangereux de se pencher au-dedans. Il y a là cette pratique, de suivre des yeux de gauche à droite un mouvent de mains, pour soulager peurs et tensions ... Il y a aussi ces histoires ou l'on voyait un illusionniste agiter un pendule devant les yeux de certaines personnes. Les similitude du temps qu’on ne sait plus présent ou passé, peut-être même futur. Pourquoi se souvenir ? Mais non, ayez peur, il est dangereux de se pencher au-dedans, qui sait ce qu'on peut y trouver ? Un monstre qui tue sur commande, un assassin ou un cannibale ... les films nous le certifient. Non il n'y a rien d'autre. Ce qui est sombre et noir n'est que violence et peur. Il ne peut rien y avoir d'autre. Restez sur la surface : un mouvement de mains vous soulage ? C'est parfait, surtout n'allez pas chercher plus loin. Et eux, avec leurs ficelles, savent-ils qu'il sont dans l'obscurité ? Peut-être qu'ils sont là parce qu'ils ont peur. Soudainement éclairés et visibles par tous, leur mécanisme grotesque ne leur appartiendrait plus. Oui parce que lorsque la lumière est là, l'ombre n'est plus, et on y trouve ces nouveaux objets.
Il existe tant de choses que nous ignorons, des sujet les plus banals et les plus simples. Il est moins grave de savoir tout. Et on prend plaisir à molester de son savoir bancal les quelques ignorants qui ont moins de bagage. Comme une sinistre loi de la jungle, celle que l'on a inventée pour symboliser notre jouissance à dominer les faibles. Est-il dangereux d'admettre notre ignorance, et la fragilité de notre supposé savoir ? Celui qui a vu une certitude s'effondrer sait la peur qui l'accompagne. Mais il sait aussi qu'elle n'est que provisoire. Elle a même le goût de la recherche de la vérité. Comment en vouloir à ceux qui sont saisis d’effroi à l'idée de perdre leurs repères ? Il ne savent pas que l'inconfort n'est que provisoire, parce que la réalité, à défaut de vérité, reste solide, on peut s'appuyer sur un sol même si on ignore de quoi il est fait. Cela nécessite néanmoins la capacité d'arriver à s'installer dans un solide inconnu, un instant présent. Dans le silence de l'être conscient et non agissant.
L’art d’être au présent
Face au temps on se sent si démuni
Le matin l'air frais emplit ma gorge, et mon nez coule à flots. Il s'irrite des frottements répétés du mouchoir. La lumière du matin, bleue et orange à la fois, le vent. Marcher, pour un but qui n’est pas le sien, avancer et feindre l’enthousiasme pour des objets qui nous sont étranger. Notre pain quotidien. On se félicite de broutilles, on se passionne de paillettes volatiles, qu’on se reproche de ne pas récolter suffisamment, qu’on veut toujours plus. La journée écrase sa fatigue sur nos épaules, et lorsque vient le soir, tout n’est que brouillard et désir d’en finir, le corps réclame son repos. Où sont les espoirs naissants au coin d’une pensée, fugitive, espoirs d’un accomplissement qui soit comme un miroir de soi et non un reflet des autres ? Le temps passe, et parfois des plaisirs futiles l’aide à se dérouler avec douceur. On arrive à oublier ce qui est soi et on se noie dans le monde. Et le temps tourne en boucle, et le corps accompli son devoir.